AMIANTE A CHATEAUBRIAND - ENTREPRISE ACIER PLUS

article de journal

Châteaubriant : leur ancienne entreprise désamiantée, ils s’inquiètent pour leur santé

Une réunion ouverte aux victimes de l’amiante était organisée samedi 14 mai 2022, à Châteaubriant (Loire-Atlantique). Plusieurs anciens salariés d’Acier Plus y ont participé.

Trois anciens salariés d'Acier Plus devant leur ancien lieu de travail récemment désamianté, à Châteaubriant (Loire-Atlantique), aux côtés du président d'ADDEVA 44 (à gauche).
Trois anciens salariés d’Acier Plus devant leur ancien lieu de travail récemment désamianté, à Châteaubriant (Loire-Atlantique), aux côtés du président d’ADDEVA 44 (à gauche). ©Léo GAUTRET/L’Éclaireur de Châteaubriant
L’Éclaireur de Châteaubriant

Depuis plusieurs mois, le chantier de réhabilitation de l’ancienne usine Acier Plus, rue de la gare, à Châteaubriant (Loire-Atlantique), attire les regards des passants et interroge ses anciens salariés.

Définitivement fermée depuis novembre 2018, l’ancienne entreprise spécialisée dans la fabrication de pièces métalliques va très prochainement accueillir un pôle de formation aux métiers de l’industrie, du bois et du bâtiment.

 

Un désamiantage qui inquiète

Certains habitants et anciens salariés d’Acier Plus s’interrogent depuis l’entame des travaux sur le site appartenant à la communauté de communes, notamment depuis la phase préalable de désamiantage.

« Lorsqu’on a vu que les ouvriers prenaient des précautions pour démonter le bâtiment, on a alerté les anciens salariés », explique Serge Adry, de l’union locale CGT de Châteaubriant.

« Un gros travail de désamiantage a été fait sur ce bâtiment », souligne-t-il. Un constat qui a poussé le représentant syndical en retraite à organiser une réunion d’information avec l’association ADDEVA 44 qui défend les droits des personnes victimes de l’amiante. Auparavant très utilisée dans l’industrie du bâtiment, son utilisation est interdite en France depuis 1997.

« Suite au désamiantage, je me suis questionné et j’ai alerté mes collègues », explique Thierry Ménard, 64 ans. L’ancien délégué syndical à Acier Plus a travaillé pendant 19 ans comme soudeur au sein de l’entreprise, avant d’être licencié en 2018 suite à la fermeture définitive du site.

Retraité depuis deux ans, il s’inquiète désormais pour sa santé et celle de ses anciens collègues. « On avait un doute, tu sais qu’il y a un toit en fibrociment en haut. On était 23 à travailler sur le site », se remémore-t-il. Quatre d’entre eux on assisté à la réunion animée par Bruno Lancelin, président d’ADDEVA 44.

Une petit dizaine de participants étaient présents, samedi 14 mai 2022, au local de la CGT à Châteaubriant (Loire-Atlantique).
Une petite dizaine de participants étaient présents, samedi 14 mai 2022, au local de la CGT à Châteaubriant (Loire-Atlantique). ©Léo GAUTRET/L’Éclaireur de Châteaubriant

 

3 à 4 000 morts chaque année en France

Lui et le représentant local de l’association, Étienne Rochery, sont intervenus pour informer les participants sur leurs droits et les inviter à faire les démarches nécessaires en cas de doute. « Les gens qui ont été exposés aux poussières de l’amiante doivent aller voir leur médecin traitant pour passer un scanner. Il ne faut pas hésiter à solliciter l’association pour avoir un deuxième regard », indique Bruno Lancelin.

Soudeurs, tuyauteurs, charpentiers… De nombreux métiers ont été impactés par l’utilisation de ce matériau cancérogène, responsable de 3 à 4 000 morts chaque année en France. « On estime que 100 000 personnes devraient encore mourir à cause de l’amiante d’ici 2025. » 26 000 personnes sont actuellement déclarées comme ayant été exposées à l’amiante au cours de leur vie dans le pays.

L’ADDEVA 44 est présente pour les accompagner dans leurs démarches médicales, de reconnaissance de victime, puis de dédommagement. « Toute personne qui a été exposée à l’amiante avant 1997 en France peut faire valoir des droits pour partir en retraite plus tôt. Une personne qui a été exposée pendant trois années à l’amiante a droit à un an de moins pour atteindre la retraite légale », explique Bruno Lancelin.

 

20 millions de tonnes d’amiante au-dessus de nos têtes

Étienne Rochery, représentant local d’Adeva 44 pays, a été exposé pendant 32 ans aux particules d’amiante. « J’en ai brassé de l’amiante. J’étais calorifugeur. J’isolais les usines, surtout les raffineries de pétrole, de sucre… On retirait l’amiante qui servait d’isolant sans protection pour refaire l’isolation avec de la laine de roche. J’ai été reconnu en maladie professionnelle en 2005. »

Étienne passe désormais des scanners de contrôle tous les deux ans. « Dès qu’on voit des gens arriver pour enlever ces plaques avec des protections, un sas de décontamination, on se pose des questions quand même », lance le retraité aux anciens salariés d’Acier Plus.

À 72 ans, Jean-Pierre Boucher, a lui travaillé pendant de longues années à la fonderie Focast de Châteaubriant. « On utilisait régulièrement du matériel qui contenait de l’amiante », se souvient l’ancien délégué syndical. Licencié en 2004 après le dépôt de bilan de l’entreprise, l’ouvrier a passé des scanners qui ont révélé la présence de plaques pleurales sur ses poumons : la manifestation la plus commune de l’exposition à l’amiante.

J’ai fait valoir mes droits et à ma maladie professionnelle a été reconnue en septembre 2004. Depuis je vis avec ça.

« Une épée de Damoclès au-dessus de la tête » pour Gilles Rivaud, électromécanicien chez Focast, qui venait pour sa part s’enquérir des précieux conseils de l’association.

On estime que 20 millions de tonnes d’amiante seraient encore présentes au-dessus de nos têtes en France, en particulier sous la forme de fibrociment. « Des chiffres sous-évalués » pour le président d’ADDEVA 44. « C’est pourquoi on veut développer la prévention, pour que tout ce qui arrive pour l’amiante ne se reproduise pas avec autre chose. »